68 en flash-back, témoignages #4

La revue Écrire l’histoire a  demandé à des gens ordinaires plutôt qu’à de grands acteurs historiques de raconter l’image, le petit fait, l’anecdote qui leur venait en tête à propos des événements de mai 68.

Paroles et textes réunis par Caroline Julliot et Claude Millet

Alain, élève à l’ENS d’Ulm en 1968

En mai 68, je vais avoir vingt ans, et je ne trouve pas que ce soit le pire âge de la vie. Pourquoi, je ne sais plus, mais je ne reviens au « Quartier latin libéré » – de toute présence policière visible en tout cas – que quelques jours après la nuit du 10. En entrant dans la cour de la Sorbonne, je remarque immédiatement sur ma droite, au-dessus d’un piano échoué là sur lequel s’exerce un jeune homme, un grand graffiti : Comment penser à l’ombre d’une chapelle ? « Fichtre, me dis-je, tout excité, il y a des situ[ationniste]s dans les parages. » Puis, du côté opposé, je suis arrêté par une autre inscription : Cours de masturbation anale, 2e étage, salle n. Mon regard balaie à nouveau la cour et s’arrête sur la statue de Victor Hugo, qui tient entre ses bras un drapeau rouge (ou noir ?). Je me sens, comme lui, pensif.

Elvire, alors élève de première dans une institution catholique de Paris

Ma sœur et moi avions senti que quelque chose de grave se passait grâce aux bonnes sœurs de notre école, qui nous avaient autorisées, privilège immense, à porter un petit foulard de couleur. Je me souviens qu’un jour nous avons couru au théâtre de l’Odéon où – tout le monde en parlait – les étudiants faisaient l’amour.

Philippe, élève de seconde littéraire au lycée de Longwy en 1968

Notre professeur de français, Mme T., se trouvait être l’épouse du jeune député gaulliste de notre circonscription. Au début du mouvement, nous avions du mal à nous faire une idée de ce qui se passait, d’autant qu’une source d’information importante était précisément cette Mme T., qui avait commencé un cours en nous déclarant solennellement qu’elle trouvait « inacceptable de faire tant d’histoires parce qu’à Nanterre les garçons n’avaient pas le droit d’aller dans les chambres et les douches des filles ».

Plus d’infos sur la revue Ecrire l’histoire

Ces témoignages seront évoqués à l'occasion du Festival des Idées :

68 en flash-back
projection-rencontre
Jeudi 22 novembre de 18 h à 21h
Université Paris Diderot, Halle aux Farines, Amphi 7C 
Esplanade Vidal-Naquet, Paris 13e
Entrée libre et gratuite

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